Dieu me parle
C’est si difficile de se parler…il y a plein d’obstacle à la parole, j’entends ici, le fait de dire quelque chose et d’être compris, pas les paroles oiseuses, à propos de la météo ou de l’actualité internationale à laquelle on ne comprend rien mais sur laquelle on a un avis très éclairé…
C’est difficile de dire quelque chose et d’écouté ce qui nous est dit. Vous connaissez certainement ces petits schémas qui nous viennent des professionnels de la communication, qui nous expliquent qu’il y a une différence entre :
- Ce qu’est une réalité, et ce que j’en pense
- Ce que j’en pense et ce que j’arrive à en dire
- Ce que j’en dis et ce que l’autre perçoit
- Ce que l’autre perçoit et ce qu’il en comprend
- Ce qu’il en comprend et ce qu’il en interprète
Bref…rien d’évident dans le fait de dire quelque chose à quelqu’un. Mais s’en rendre compte, c’est déjà une réel première étape. Il ne faut jamais penser que tout est simple et évident. Tout, dans ce que l’on dit à son importance, et vous ne le savais que trop : les mots, le ton, le silence qui précède qui suit, les gestes, le visage,…tout !
Et cette communication, cet échange de paroles, s’avère difficile déjà avec des êtres que l’on voit et entend, alors quelqu’un qu’on ne voit pas et n’entends pas ! D’abord est-ce possible ? Et si oui, comment ?
Bons nombres de saints ont fait cette expérience de voix intérieurs, et discrètes. Saint Antoine en prière silencieuse entend intérieurement : « Antoine, si tu veux que je te parle, tais-toi ». Mère Théresa de même : « Viens soit ma lumière, je ne peux pas aller seul ».
Sans même aller jusqu’à ses expériences plutôt exceptionnelles, les saints parlent aussi de paroles de Dieu reçu par les frères. Ste Thérèse raconte qu’adolescente elle va se confesser, et elle souffre d’une grande scrupulosité. Elle se sent indigne, et a soif de perfection absolue. Un prêtre lui dira simplement un jour « En présence de Dieu, votre âme est aussi pure qu’un lys », c’est une libération pour la jeune fille. Elle dira « cette parole fût pour moi une lumière du ciel »
Plus récemment et à un degré de sainteté moindre, une jeune femme, que Jésus allé chercher, mais alors très loin, me partagé cette étonnante expérience qu’elle fait d’avoir l’impression de l’entendre un peu partout, et que ça l’émerveillé même.
Faisons même l’exercice, as-t-on déjà vécu quelque chose de similaire ?
On voit tout de suite les bienfaits et les dangers. Il me parle, certes, mais est-ce bien lui tout le temps, ou un piège de l’autre ? ou mes propres illusions ? Alors essayons d’y voir plus clair. Dieu parle vraiment, mais suis-je disposé à écouter ?
Nous prendrons un chemin qui ira du plus extérieur au plus intérieur, comme une sorte de purification de notre écoute. De plus, je vais concentrer mes références sur le Ps 118, c’est le plus grand psaume, celui qui fait l’éloge de la Parole de Dieu.
I. Dieu me parle par sa création et les évènements
Création et Providence sont des œuvres divines et par ses œuvres le Créateur dit quelque chose. Rien n’est neutre dans le monde. Puisque le monde est le résultat d’une volonté, cette volonté est nécessairement soutenue par une intention, et cette intention est un langage que nous pouvons apprendre à écouter.
a. Le livre de la nature
L’Harmonie du monde nous dit quelque chose de qui est Dieu.
« de ton amour la terre est pleine Seigneur, apprends-moi tes volontés » (Ps 118.64)
« les cieux racontent la gloire de Dieu, le firmament raconte l’œuvre de ses mains » (Ps 19.2)
Saint Augustin commente : « interroge la beauté, elle te répondra : « c’est Dieu qui m’a faite » (Sermon 241).
Apprendre à contempler et à s’émerveiller est déjà décoder un langage. Comme une tenue dit quelque chose de celui ou celle qui la porte.
Les lois de la nature sont aussi inscrites en nous :
« tes mains m’ont fait et fixé, fais-moi comprendre j’apprendrai tes volontés » (Ps 118.73)
Les commandements de Dieu, on va y venir, nous enseigne, mais aussi la loi naturelle agit. Le meurtre est universellement reconnu comme mauvais. Ma conscience me parle, et écouter sa conscience (en l’ayant formé aussi – on est responsable devant sa conscience mais aussi de sa conscience) c’est aussi une manière d’écouter Dieu.
b. Les événements
Dieu continue d’agir dans le monde, c’est ce que l’on nomme la Providence. Et comme Dieu, lui, ne change pas, il dit toujours la même chose.
Quelques passages du Ps 118 qui illustre la question des épreuves et de la voix de Dieu :
« avant d’être affligé je m’égarais, maintenant j’observe ta promesse » (Ps 118.67)// « un bien pour moi que d’être affligé, afin d’apprendre tes volontés » (Ps 118.72)// « Je sais Seigneur, qu’ils sont justes tes jugements, que par fidélité tu m’afflige » (Ps 118.75)// « que les impies me guettent pour ma perte, je comprends ton témoignage » (Ps 118.95)
II. L’Eglise et les autres
« Vérité, chacun de tes commandements, quand le mensonge me persécute, aide-moi » (Ps 118.86) // « qui entends la vérité entend ma voix » (Jn…)
« le fer s’aiguise par le fer, et l’homme par l’homme » (Pr 27.17)
Une parole, une rencontre, parfois correction fraternelle
« Dieu parle souvent à notre âme par la bouche d’un ami spirituel » (S. François de Salles).
L’Eglise et son enseignement est une parole de Dieu.
Les sacrements sont des paroles visibles.
L’écoute de Dieu, n’est en fait jamais purement individuelle, elle a une dimension communautaire. Dieu peut me parler à moi tout en parlant à tous.
Il faut donc garder un regard de foi, et non de superstition. Regarder le monde, les événements, les personnes dans la foi. Cela ne signifie pas que Dieu dit quelque chose d’explicit de précis, dans chaque fleur, chaque oiseau, chaque rencontre. Attention à ne pas voir (ou plutôt chercher) des « signes » en tout et tout le temps. Dieu parle tout le temps certes, en tout cela. Il nous dit sans cesse sa gloire, et qu’il nous aime, mais il ne nous dit pas systématiquement dans un vol de Paille-en-queue si je dois changer de job ou non.
III. Sa Parole de Vérité
La puissance de ce moyen, c’est qu’il est objectif. Le précédent l’est aussi, mais pas toujours évident à décrypter. La parole de Dieu, ce sont des mots, un langage, et de ce fait, c’est probablement le moyen le plus sûr pour écouter ce que Dieu me dit.
« Comment, jeune, garder pur son chemin ? En observant ta parole ! » (Ps 118.9)
« Fais moi comprendre et que je garde ta loi, que je l’observe de tout cœur » (Ps 118.34)
« Merveille que ton témoignage, aussi mon âme le garde. Ta parole en se découvrant illumine , et les simples comprennent » (Ps 118.129)
« Infléchis mon cœur vers ton témoignage et non point vers le gain » (Ps 118.36)
Dieu me parle objectivement dans l’Ecriture, et l’Esprit me permet de comprendre.
Seulement, ces textes restent des lettres mortes si l’Esprit ne les animent pas. Il ne suffit pas de lire. C’est déjà pas mal, mais c’est insuffisant :
« Ignorer les Ecritures, c’est ignorer le Christ » (S. Jérôme)
Méthode de la lectio divina, mémoriser des versets. Ce la doit devenir une lecture priante. Prendre vraiment conscience que Dieu s’adresse à moi, personnellement, qu’il a quelque chose à me dire.
« L’Ecriture grandit avec celui qui a lit » (S. Grégoire).
Une parole peut illuminer une journée.
Ne pas chercher une réponse systématique. L’Ecriture n’est pas une production de texto. C’est une relation vivante. Dieu me parle en continue, pas par a-coût. Ça arrive, mais cela porte plus de fruit quand je vais régulièrement faire grandir l’Ecriture en moi.
IV. En moi
Le Seigneur peut s’adresser directement à moi, dans la paix, le silence intérieur. Comme pour S. Antoine.
a. Ma mémoire
« j’énumère mes voies, tu me réponds, apprends-moi tes volontés » (Ps 118.26 » // « je fais réflexion sur mes voies et je reviens à ton témoignage » (Ps 118.59)
« Dans mon cœur j’ai conservé tes promesses pour ne point faillir envers toi » (Ps 118.11)
b. Ma méditation
« Sur tes préceptes je veux méditer et regarder tes chemins « (Ps 118.15)
« Rappelle-toi ta parole à ton serviteur, dont tu fis mon espoir. Voici ma consolation dans ma misère : ta promesse me vivifie » (Ps 118.49-50)
Prier pour savoir : « Agrée l’offrande de ma bouche, Seigneur, apprends-moi tes jugements. Mon âme à tout moment entre mes mains, je n’oublie pas ta loi » (Ps 118.108-109)
L’intuition spirituelle, les élans de charité, les paroles de connaissances
c. Eléments de discernements
Pas toujours compréhensible « de toutes perfections j’ai vu le bout, combien large sont tes préceptes » (Ps 118.96)
Est-ce conforme à l’Evangile et à l’enseignement de l’Eglise
Est-ce que ça me rapproche du Christ ?
Est-ce que cela produit paix, humilité et charité ?
Ai-je prié et demandé conseil ?
Suis-je disposé à obéir à ce que Dieu montre ?
Conclusion
Dieu parle, il parle tout le temps. De quoi parle-t-il ? De lui-même, du seul sujet qui importe en vrai, la perfection même. Il nous parle de lui-même, parce que nous sommes le résultat de cette bonté. Le problème ce n’est pas son silence, mais notre surdité.
Ne jamais perdre de vue, que notre écoute, doit toujours être à travailler, c’est une aptitude qui n’est jamais complétement acquise, et pour cause, un tout petit peu de bruit et on n’entend plus rien.
« Parle Seigneur, ton serviteur écoute » 1 S 3.10.